La description au jour le jour des événements de la seconde guerre mondiale avec 67 ans de décalage
La guerre mondiale est à son point culminant.
Il est naturellement assez arbitraire de chercher dans le passé une comparaison avec le présent. Je crois bien, tout de même, que beaucoup d'esprits réfléchis découvrent des analogies entre la situation actuelle de la guerre et celle qui se présentait vers la fin de 1917.
Aujourd'hui, l'ennemi, car le Japon, l'Allemagne et l'Italie ne font qu'un, tient dans le Pacifique un avantage certain. Il a enlevé Singapour, envahi les Indes Néerlandaises, submergé les Philippines, pénétré en Birmanie. Il a pu se rétablir en Cyrénaïque. Il se cramponne énergiquement à ses positions en Russie. Les mers foisonnent de ses sous-marins. On sent approcher le suprême effort d'Hitler.
Dans l'automne de 1917, l'ennemi avait abattu la Russie et pénétré jusqu'au Caucase; il venait d'écraser à Caporetto l'armée italienne; il poussait ses avant-gardes jusqu'au canal de Suez et aux abords de Salonique; sur le front principal de l'Ouest, il tenait en échec les Français, les Anglais et les premières troupes d'Amérique; il menait dans l'océan la guerre sous-marine renforcée. On attendait l'ultime assaut d'Hindenburg.
Or, quelques mois après, cet assaut avait été brisé et l'offensive des Alliés se déclenchait sur tous les théâtres, jusqu'au jour où, sans aucune raison en apparence décisive, l'ennemi envoyait ses plénipotentiaires capituler dans le wagon de Rethondes.
Je ne dirai certes pas que ce processus victorieux doive se dérouler de nouveau suivant le même rythme et dans le même délai. Rien n'est écrit d'avance et le fatalisme passif est, à la guerre, le pire danger. Mais nous avons deux bonnes raisons pour compter ferme que le drame actuel se terminera, comme le précédent, par l'écrasement de l'ennemi.
La première raison est d'ordre matériel.
L'ennemi a eu, jusqu'à présent, la partie belle. En Extrême-Orient comme en Europe, il a toujours attaqué par surprise ses adversaires mal préparés. Mais s'il a su, tout de suite, faire le plein de ses succès parce qu'il avait fait d'emblée le plein de ses forces, ses adversaires se sont ressaisis. Nous faisons notre compte. Nous savons de quels moyens puissants dispose maintenant le parti de la liberté et nous savons de quels moyens énormes il disposera avant un an.
La deuxième raison de notre certitude est en nous-mêmes. Elle est d'ordre moral. Si c'est le moment du doute pour les cœurs faibles, c'est, pour les cœurs forts, le moment des grandes résolutions.
Or, parmi ceux qui mènent le bon combat, nous constatons qu'on renonce au moindre effort. L'absurde esprit de défensive et de concessions au mal, qui s'exprimait, stratégiquement parlant, par " Ligne Maginot " et, politiquement parlant, par Munich , est bel et bien en train de faire place à l'esprit d'attaque et d'intransigeance sans lequel toute guerre est perdue.
La France, pour écrasée qu'elle soit, participe au redressement mondial. Ceux de ses enfants qui combattent serrent les rangs et redoublent d'efforts. Ceux qui ne peuvent encore le faire lèvent la tête vers l'espérance. Nous ne savons que trop que nos terres sont un champ de bataille, malgré le mensonge des Armistices. Chez nous, l'ennemi et ses amis écoutent chaque jour grandir contre eux la haine et la menace. Et l'on voit même des accusés, que les traîtres ont traînés à l'infâme procès de Riom, bousculer la mascarade et accuser la trahison.
Allons ! Le pire va finir, le meilleur est en marche.
Voici l'heure de Clemenceau !